Des salons au mécénat

Publié dans Le mécénat

Qu’est-ce qui rendit le salon de la princesse Edmond de Polignac aussi unique ? Elle ne fut pas la première personne de l’aristocratie à organiser de brillantes réunions musicales. Elle ne fut pas, non plus, la première femme de son époque à apporter une importante contribution financière à l’art. Ce qui différencie Winnaretta Singer-Polignac de ses pairs, ce sont ses dons artistiques personnels dans des domaines variés : excellente artiste peintre, écrivain publié, compositrice d’avenir, pianiste et organiste accomplie qui pouvait jouer sa partie dans un récital pour piano ou pour orgue.

Dès 1887, Winnaretta Singer, alors princesse de Scey Montbéliard, faisait preuve de goûts sophistiqués et voulait donner la priorité à sa musique préférée et particulièrement à la musique moderne ; elle commença donc à organiser ses propres concerts dans l’atelier lambrissé de chêne, au rez-de-chaussée de la rue Cortambert dans le seizième arrondissement de Pairs, où elle avait fait installer un magnifique orgue de Cavaillé-Coll. Par comparaison avec les autres salons brillants, ceux de Mesdames de Gabric et de Narbonne Lara, de la baronne Alphonse de Rotchshild et des comtesses Greffuhle, de Béarn et de Taskin, ces premières matinées et soirées furent un modèle de choix et d’excellence autant pour le choix des œuvres présentées que pour leur interprétation. Elle y accueillit des compositeurs de l’ancienne génération : Emmanuel Chabrier, Fauré, Saint-Saëns, Reynaldo Hahn etc. Mais son amour de la modernité était plus fort, elle pensa toute sa vie qu’il était essentiel d’aider les jeunes artistes d’avant-garde : Satie, Ravel, des compositeurs étrangers comme Stravinski ou Manuel de Falla, et après la Première Guerre mondiale, tous les compositeurs de la Nouvelle Vague, le groupe des Six, avec Francis Poulenc, Georges Auric, Germaine Tailleferre, Darius Milhaud, Louis Durey, Arthur Honegger.