L’œuvre des frères Goncourt, un système de valeurs ?

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Sous le haut patronage de l’Académie Goncourt

événement organisé par l’équipe Goncourt et le Centre de recherches

sur les Poétiques du XIXe siècle de l’Université de la Sorbonne nouvelle

Colloque du Bicentenaire organisé par Jean-Louis Cabanès, Pierre-Jean Dufief,

Béatrice Laville, Vérane Partensky et Éléonore Reverzy

Les frères Goncourt furent des témoins majeurs de la seconde moitié du XIXe siècle dont ils ont commenté jour après jour, dans leur Journal, l’actualité et ses soubresauts, proposant un panorama exceptionnel et détaillé de la vie artistique, littéraire, politique et mondaine de leur temps. Romanciers de talent qui participèrent activement au triomphe du réalisme littéraire, auteurs de théâtre contestés, historiens, critiques d’art, collectionneurs, fondateurs d’un prix aujourd’hui encore prestigieux, qui a contribué à donner au genre romanesque ses lettres de noblesse, les Goncourt apparaissent, 200 ans après la naissance d’Edmond, comme des écrivains dont le rôle et l’influence appellent une réflexion approfondie dont la récente biographie de J.-L. Cabanès et P.-J. Dufief a montré la nécessité. « Ils ont été considérables », assurait déjà Thibaudet en 1936, « par leur influence, dont toute la littérature française, depuis soixante ans, a été retournée et labourée » (Réflexions sur la littérature, Paris, Gallimard, 1938, p. 116).
À la croisée des genres et des courants artistiques (roman, théâtre, fantaisie, réalisme, histoire de l’art, histoire, critique, écriture diariste), ils occupent une position à la fois centrale et excentrique dans le champ littéraire, dont ils ont été des acteurs importants, mais aussi des juges et des critiques particulièrement attentifs à la question fondamentale de la valeur, dont ils auscultent avec minutie et inquiétude les transformations. Parce qu’ils relatent et jaugent leur temps, tour à tour en moralistes intempestifs et en écrivains modernes, mais aussi parce qu’ils déplacent sans cesse les perspectives, interrogeant les évolutions immédiates (la modernité, l’émergence de la bourgeoisie, l’industrialisation de la littérature, la dictature de la presse, le pouvoir de la mode, etc), comme les déplacements culturels (réévaluation du XVIIIe siècle, art japonais, normes classiques, systèmes politiques), les deux frères ont posé, à l’échelle d’un demi-siècle, la question de la définition et des critères de la valeur (esthétique, morale et sociale) au moment même où les liens qui unissaient traditionnellement l’esthétique et l’éthique sont bouleversés par l’émergence de la modernité, de l’art pour l’art, du capitalisme et de la démocratie. Leur Journal apparaît parfois comme un livre de comptes où ils créditent ou débitent leurs contemporains, soupesant les honnêtetés, la qualité de coeur, les vanités, les compromissions. Le goût du Beau seul, avec son corollaire l’admiration, leur semble étalonner les oeuvres et les hommes. Observateurs pénétrants, ils sont certains d’être des hommes de goût, jugeant les oeuvres d’art sans a priori. Leur nervosité, leur sensibilité, en conjonction avec leur connoisseurship, garantirait la pertinence de leurs jugements esthétiques. Les nerfs, comme vecteurs de la sensibilité, comme traits d’union entre l’âme et le corps, comme principes d’une réflexivité du sentir, induisent une sorte d’ambivalence des valeurs éthiques et esthétiques dont ils sont les vecteurs. La pitié, la compassion sont affaire de sensibilité, mais les Goncourt se réclament aussi d’une lucidité cruelle.
Leurs écrits définissent des axiologies qui réfèrent aux catégories esthétiques mais aussi aux valeurs morales que les fictions tout particulièrement déploient. Leurs romans retracent volontiers des parcours exemplaires qui laïcisent parfois des valeurs chrétiennes (le pardon, la charité) ou prennent la forme de calvaires dont le sens échappe mais qui permettent d’engager la critique des institutions religieuses et judiciaires notamment. La Fille Élisa met ainsi en cause des dispositifs de surveillance et de silence qui associent la religion et l’État. L’oeuvre romanesque et théâtrale renoue parfois avec le manichéisme du mélodrame et du feuilleton. Dans un univers sans transcendance, comment sortir de la satire dès lors qu’on aborde la question morale ?
Les frères Goncourt n’ont cessé de proclamer la valeur de leurs oeuvres, leur qualité d’hommes de lettres, leur avant-gardisme qui ferait d’eux des précurseurs. Ils entendent partout affirmer leur qualité, ou si l’on préfère, en termes sociologiques, leur « distinction ». Ce mot définit leur positionnement social, politique, esthétique, stylistique quelle que soit la « vertu » démocratique de romans centrés aussi bien sur une servante hystérique qui, par ses nerfs, est en partie leur répondant que sur une jeune fille de la haute société impériale, qui, par son culte du chiffon, leur ressemble un peu. L’écriture artiste signe en ces temps de journalisme et d’oeuvres anonymes (une page de Maupassant selon Edmond pourrait être signée par n’importe qui : elle ne porte aucune marque), leur aristocratisme, comme un code de l’honneur dans les lettres, leur différence. Il existe pour eux une éthique de la création qui fait sens par opposition aux facilités des bohèmes, aux ficelles de la littérature industrielle, aux procédés de la tradition académique ; cette morale, parfois baptisée « idéal », tend à faire accroire qu’ils sont étrangers aux circuits économiques. La valeur (qualitative) de l’art ne se mesurerait pas à l’aune de l’argent gagné par un écrivain. L’échec, en revanche, peut avoir une valeur distinctive et devenir la signature d’une qualité méconnue du grand public.
Dans ce contexte, comment les valeurs éthiques et esthétiques sont-elles atteintes par des formes nouvelles de distinction ? Comment la littérature est-elle à la fois un miroir et un agent de la constitution, de la transmission et des révolutions de valeurs ? En quoi écrire suppose-t-il, par-delà la diversité des convictions et des postures morales, une éthique de la littérature ? L’oeuvre des Goncourt, par son ampleur, par la diversité de ses points de vue, par sa pluridisciplinarité, par les valeurs morales qu’elle persiste à représenter, par le témoignage exceptionnel que constitue le Journal, offre un point de vue privilégié sur une question longtemps refoulée par les études critiques poétiques ou formalistes, mais qui se pose, dans le contexte actuel, avec acuité et invite à une réflexion globale et nourrie sur les Goncourt, sur leur oeuvre, leur place dans le champ littéraire et leur héritage.


Partenaires

 


Programme

27 juin 2022

9h30 – Accueil des participants

9h45-10h : 

  • Introduction d’Eléonore Reverzy, directrice du CRP19 et responsable de l’équipe Goncourt (ITEM/CNRS)

10h-13h

Séance 1 : Évaluations

Présidence de séance : Robert Kopp

10h50 – Discussion

11h10 – 11h25 – Pause

12h40-13h – Discussion

13h-14h – Déjeuner

14h-16h35

Séance 2 : Éthique et mode de vie

Présidence de séance : Paolo Tortonese

14h50 – Discussion

15h10-15h25 – Pause

16h15 – Discussion

16h35 – Fin de la première journée


28 juin 2022 

10h15 – Accueil et inscriptions des participants

10h25-13h

Séance 3 : Valeurs du temps

Présidence de séance : Stéphane Guégan 

11h15 – Discussion

11h35-11h50 – Pause

12h40 – Discussion

13h-14h – Pause déjeuner

14h-16h

Séance 4 : Valeurs de la communauté

Présidence de séance : Béatrice Laville

14h50 – Discussion

16h – Discussion

16h20-16h35 – Pause

16h35-18h

Séance 5 : Écritures de la valeur

Présidence de séance : Eléonore Réverzy

17h25 – Discussion

17h45 – Conclusions

18h – Clôture du colloque


Biographies

Pauline Schnapper


Eléonore Réverzy


Bernard Vouilloux

Bernard Vouilloux, professeur de littérature française du xxe siècle (littérature et arts visuels) à Sorbonne Université, a centré ses recherches sur les rapports entre le verbal et le visuel, littérature et peinture, poétique et esthétique. Au sein du Centre d’étude de la langue et de la littérature françaises-CELLF (UMR 8599 CNRS/Sorbonne Université), il est responsable de l’axe transversal « Littérature, arts, médium ». Outre de très nombreux articles, il a publié une vingtaine d’ouvrages, parmi lesquels, dernièrement, Figures de la pensée. De l’art à la littérature – et retour (Hermann, 2015) et Gisèle Vienne. Plateaux fantasmatiques (Shelter Press, 2020).


Alexandre Péraud

Docteur en littérature française et diplômé de l’Institut de Sciences politiques de Bordeaux, Alexandre Péraud est maître de conférences habilité en littérature française et membre de l’équipe d’accueil TELEM. Spécialiste du roman réaliste, il réfléchit aux relations qu’entretiennent la littérature et les sciences, notamment l’économie, au XIXe et XXe siècles. Il a notamment publié Le crédit dans la poétique balzacienne (Garnier, 2012) et La comédie (in)humaine de l’argent (dir.) (Le Bord de l’eau, 2013).


Kosei Ogura

Koseï Ogura est professeur à Keio University (Tokyo). Il étudie principalement le roman français du XIXe siècle dans ses rapports avec l’histoire sociale et culturelle. Il est notamment l’auteur Comment on représente l’histoire. Dialogues entre littérature et historiographie, 2021, Zola et la France moderne. De l’histoire au récit, 2017, Nadar photographe, 2016 et de Lire les autobiographies de criminels, 2010.


Stéphane Guégan

Historien, critique d’art et conseiller scientifique auprès de la Présidence du Musée d’Orsay, Stéphane Guégan est l’auteur de plusieurs livres sur la peinture et la littérature des XIXe et XXe siècles, dont une édition des Salons de Stendhal (Le Promeneur, 2002), une biographie de Théophile Gautier (Gallimard, 2011) et un essai sur la critique d’art de Baudelaire (Flammarion, 2021). Il a été le commissaire de plusieurs expositions : Théodore Chassériau. Un autre romantisme (Grand Palais, 2002), De Delacroix à Renoir. Les peintres français en Algérie (Institut du monde arabe, 2003), Ingres (musée du Louvre, 2006), Manet. Inventeur du Moderne (musée d’Orsay, 2011), Bistrot! De Baudelaire à Picasso (Bordeaux. Cité du vin, 2016), Le Modèle noir. De Géricault à Matisse (musée d’Orsay, 2019), Toulouse-Lautrec, résolument moderne (Grand Palais, 2019) et Huysmans. De Degas à Grünewald (musée d’Orsay, 2019).


Nao Takaï

Nao Takaï est maître de conférences à la Japan Women’s University de Tokyo où elle enseigne la littérature et la culture françaises. Titulaire d’un doctorat de langue et littérature françaises obtenu à l’Université de Paris Nanterre en 2010, elle est l’auteur du Corps féminin nu ou paré dans les récits réalistes de la seconde moitié du XIXe siècle (Champion, 2013). Ses travaux récents portent sur les vêtements et la mode dans les ouvrages des écrivains du XIXe siècle, parmi lesquels « Le tulle et la représentation du corps féminin chez les écrivains français du XIXe siècle – Balzac, Zola et les frères Goncourt » (Tissus et vêtements chez les écrivains au XIXe siècle : sociopoétique du textile, A. Montandon dir., Champion, 2015) et « Edmond de Goncourt et la mode féminine fin de siècle (Cahiers Goncourt, 2019.


Sébastien Roldan

Sébastien Roldan est professeur associé de littérature française du XIXe siècle à l’Université de Winnipeg (Canada). Ses recherches interrogent le dialogue qui s’effectue dans l’œuvre littéraire entre littérature et philosophie, en particulier dans le roman naturaliste français. Il a fait paraître dans cette veine un essai, La Pyramide des souffrances (PUQ, 2012), et un numéro de périodique, La Seine littéraire au XIXe siècle (revue Arborescences, 2019). Ses travaux sur les premières œuvres des frères Goncourt ont paru notamment dans les Cahiers Goncourt (2013), dans le collectif Les Goncourt historiens (2017), ainsi que, plus récemment, dans le podcast que le collège de sociocritique de Montréal a consacré en mars 2021 à l’imaginaire du masque.


Stéphane Gougelmann

Maître de conférences en littérature française à l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne, membre de l’UMR IHRIM, Stéphane Gougelmann travaille principalement sur la seconde moitié du XIXe siècle, en particulier sur l’œuvre de Jules Renard. Il a notamment dirigé, avec Jean-Louis Cabanès, le numéro de la revue Europe (novembre-décembre 2015) consacré aux frères Goncourt et à Jules Renard et fait paraître chez Classiques Garnier, en 2017, Jules Renard, écrivain de l’intime. Il s’intéresse également aux représentations du genre et des sexualités en littérature dans une perspective poétique et historique. Aux Presses de l’Université de Saint-Étienne (PUSE), il a ainsi dirigé avec l’historienne Anne Verjus Écrire le mariage en France au XIXe siècle (2017) et a créé la collection « le genre en toutes lettres ». 


Émilie Sermadiras

Agrégée de lettres modernes et docteure en littérature française, Émilie Sermadiras est actuellement lectrice d’échange à l’Université de Bari. Ses recherches portent sur les liens entre littérature, médecine et religion dans le roman du XIXe siècle. Elle a récemment publié Croire et souffrir. Religion et pathologie dans le roman de la seconde moitié du XIXe siècle (Classiques Garnier, 2021) : l’ouvrage est une version remaniée de sa thèse, soutenue en 2018, à l’Université Sorbonne-Université. Elle prépare actuellement une édition critique de La Fille Élisa, dans le cadre de l’édition des Œuvres narratives complètes des frères Goncourt, sous la direction de Jean-Louis Cabanès (Classiques Garnier).


Jean-Didier Wagneur

Jean-Didier Wagneur est chercheur au sein du Centre des Sciences des Littératures en langue Française (Université Paris Nanterre) et de l’Équipe Goncourt (CRP19).


Marie-Astrid Charlier

Marie-Astrid Charlier est maîtresse de conférences en littérature française du XIXe siècle à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3, membre du RiRRa21 et de l’ANR Numapresse. Ses travaux portent sur les naturalismes (roman, nouvelle, théâtre) ainsi que sur les liens entre littérature, médias et culture visuelle. Elle a notamment publié Le Romans et les Jours. Poétiques de la quotidienneté au XIXe siècle chez Classiques Garnier en 2018. Une liste de ses publications est disponible sur HAL. 


Véronique Samson

Véronique Samson enseigne la littérature au collège du Vieux Montréal, après avoir mené des recherches postdoctorales à l’Université de Cambridge et plus récemment au CRP19, à l’Université Sorbonne Nouvelle. Son livre Après la fin. Gustave Flaubert et le temps du roman est paru au début de l’année 2021 aux Presses universitaires de Vincennes. Ses recherches actuelles portent principalement sur la mémoire dans le roman du XIXe siècle. Elle a codirigé avec Marie-Astrid Charlier un dossier portant sur les « Temps vécus, temps racontés », qui paraîtra en 2022 dans la revue en ligne KOMODO 21.


Robert Kopp

Après des études à l’École Normale Supérieure et à la Sorbonne, Robert Kopp a enseigné dans les classes préparatoires de Stanislas-Saint-Louis, puis a été l’assistant de Georges Blin au Collège de France. Nommé, en 1971, professeur à l’université de Bâle, il y a occupé la chaire qui fut celle de Marcel Raymond, Albert Béguin, Georges Blin, Jean Starobinski, Claude Pichois. Doyen de la Faculté des Lettres et Sciences humaines, il a également été professeur associé à la Sorbonne, à l’Université de Paris X, à l’EPHE, à l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm.

Derniers ouvrages parus : Baudelaire, le soleil noir de la modernité (Gallimard, 2004, coll. « Découvertes », nouvelle édition 2017); édition critique de La Vielle Fille de Balzac (Gallimard, 2002, coll. „folio“, nombreuses réimpressions); édition critique du Spleen de Paris (Gallimard, coll. « poésie », 2006) ; Breton (Album de la Pléiade, Gallimard, 2008) ; La place de la NRF dans la vie littéraire du XXe siècle, 1908-1943 (Gallimard, « Les Cahiers de la NRF », 2009, ouvrage collectif); Romantisme et révolution(s) (Gallimard, « Les Cahiers de la NRF », 3 volumes, 2008-2010, ouvrage collectif); Un siècle de Goncourt (Gallimard, 2012, collection « Découvertes ») ; Gide, Copeau, Schlumberger : l’Art de la mise en scène (Gallimard, « Les Cahiers de la NRF », 2017, ouvrage collectif), Un monde de lettres. Les auteurs de la première NRF au miroir de leurs correspondances, Gallimard, « Les Cahiers de la NRF », 2021, ouvrage collectif). 


Zadig Gama

Zadig Gama est Chargé de cours de langue et littérature françaises à l’Université de l’État de Rio de Janeiro et Doctorant en Lettres Néolatines (Littératures de Langue française) à l’Université Fédérale do Rio de Janeiro, sous la direction de Mme Celina Mello, ayant suivi un stage doctoral à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris III, sous la supervision de Mme Éléonore Reverzy. Son sujet de thèse porte sur la circulation, réception et pérennité de l’œuvre des frères Goncourt dans le champ littéraire brésilien. Parmi ses publications récentes, l’on citera « La réception de Sœur Philomène au Brésil », dans les Cahiers Edmond et Jules de Goncourt ; et « Academia Goncourt : a instituição em três momentos », dans la revue Interfaces.


Peter Vantine

Peter Vantine enseigne à Saint Michael’s College (Vermont, États-Unis), où il est Professeur de français, Directeur du département de Classical and Modern Languages and Literatures [Littératures et Langues Classiques et Modernes], et Directeur du programme de First-Year Seminar [Séminaire de première année]. Une partie importante de ses travaux sur la littérature française du dix-neuvième siècle portent sur l’œuvre des frères Goncourt.


Pierre Dufief

Pierre-Jean Dufief est professeur émérite à l’université de Paris-Nanterre. Il a travaillé sur le roman de la seconde moitié du XIXe siècle, sur l’œuvre des frères Goncourt ainsi que sur les correspondances d’écrivains du XIXe siècle. Il a dirigé pendant douze ans une unité du CNRS consacrée aux correspondances et journaux intimes. Il a édité plusieurs volumes de la correspondance générale et croisée des Goncourt et est président de Société des amis des Frères Goncourt. Il a coordonné avec Colette Becker le Dictionnaire des naturalismes, Champion, 2018 et a publié en 2020 avec Jean-Louis Cabanès une biographie des Frères Goncourt chez Fayard. 


Stéphanie Champeau

Stéphanie Champeau, ancienne élève de l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm, agrégée de Lettres Modernes et docteur en littérature, est maître de conférences à l’Université de Rouen et spécialiste du XIXe siècle, particulièrement de l’œuvre des Goncourt : elle a publié un ouvrage intitulé La Notion d’artiste chez les Goncourt (Champion, 2000) et procuré des éditions de leurs romans Manette Salomon (folio, 1996) et Renée Mauperin (Classiques Garnier, 2014). Elle travaille aussi sur Flaubert (colloque sur Salammbô en 1996, sur Madame Bovary en 2006, communication sur Flaubert et les Goncourt en 2016, séminaire Flaubert, site Flaubert de l’université de Rouen…). Elle a aussi publié, avec Sylvain Ledda, une édition de La Cousine Bette de Balzac chez Garnier-Flammarion (2015) et a écrit récemment plusieurs articles sur Barbey d’Aurevilly.


Chantal Pierre

Chantal Pierre est maître de conférences en littérature du dix-neuvième siècle à l’Université de Nantes. Elle est membre du comité de rédaction de la revue électronique Atlantide et des Cahiers naturalistes. Elle a travaillé sur Zola (Zola, Les Fortunes de la fiction, Nathan, 2000, édition G-F de L’Assommoir), les Goncourt (« Les larmes aux yeux : les Goncourt pathétiques », Europe, nov-déc. 2015), le naturalisme (« Viols naturalistes : ‘commune histoire’ ou ‘épouvantable aventure ‘ ? », Tangence, n°114, 2017), la génétique et la poétique du roman. Ses derniers travaux portent sur la place de l’émotion comme critère du discours et du jugement critique au XIXe siècle (« Un héritage naturaliste : la querelle de l’empathie », Naturalisme.- Vous avez dit naturalismeS ?, 2016, PSN ; « C’est que le coeur aussi se dessèche » : Gide, Flaubert et la sympathie, Bulletin des amis d’André Gide, Automne 2020).


Federica D’Ascenzo

Federica D’Ascenzo est professeur associé de Littérature Française auprès du Dipartimento di Lingue, Letterature e Culture Moderne de l’Università degli Studi « G. d’Annunzio» de Chieti-Pescara (Italie). Ses recherches portent sur la littérature française d’Avant-garde des XIXe et XXe siècles, sur l’évolution des techniques et des poétiques romanesques de la seconde moitié du XIXe siècle et du XXe siècle, et sur les rapports entre littérature francophone et culture italienne analysés par le biais de la réception, de la traduction, de l’autotraduction et de la réécriture. Elle a consacré de nombreux articles à l’œuvre d’Edmond et Jules de Goncourt et notamment une monographie I fratelli Goncourt e l’Italia (2012). Elle a également publié des éditions critiques visant à valoriser l’apport d’auteurs oubliés de la fin de siècle dans le renouvellement des formes narratives – Édouard Dujardin, Les Hantises (2001), Francis Poictevin, Songes (2012).


Véronique Cnockaert

Véronique Cnockaert est professeure au Département d’Études littéraires de l’Université du Québec à Montréal. Elle est spécialiste du XIXe siècle et particulièrement de l’œuvre de Zola et du Naturalisme (Édition d’Une Page d’amour de Zola, Paris, Garnier, 2021 ; Édition de Renée Mauperin des Goncourt, Paris, H. Champion, 2017 ; Édition commentée d’Au Bonheur des Dames, « Foliothèque », Paris, Gallimard, 2007). Elle s’intéresse également aux rapports entre littérature et ethnologie, elle a publié en collaboration avec Marie Scarpa et Jean-Marie Privat (univ. Paul-Verlaine de Metz) une Anthologie de l’ethnocritique (Presses U. de Québec, 2011).



Résumés de communication

Le jugement des Goncourt : une éthique et une esthétique de la valeur d’usage 

par Bernard Vouilloux

De bons esprits mettent régulièrement l’accent sur les « erreurs » de jugement dont les Goncourt se seraient rendus coupables : ces apôtres autoproclamés du goût, si prompts à dénoncer la fausse monnaie mise en circulation par les institutions, la presse, les écrivains et les artistes pressés d’arriver, ne sont-ils pas passés à côté de ceux que nous tenons pour les plus novateurs de leur temps ? Si leurs choix peuvent nous paraître discutables, du moins sont-ils gagés sur une « forme de vie » qui, associant étroitement une écologie de l’art et une éthologie de l’artiste, valorise dans l’œuvre l’empreinte sensible d’un individu et d’une époque. Les œuvres qui comptent aux yeux des Goncourt sont en effet celles qui possèdent un haut potentiel indiciaire : contre la reproduction mécanique dont les peintres réalistes reprendraient le principe au daguerréotype, ils jouent la mise en forme du document, et cela aussi bien dans leurs romans que dans leurs études historiques ou leurs monographies d’artistes ; contre l’impressionnisme, le processus même de fabrication des « impressions » japonaises, dans les plis desquelles se logent des façons de penser et de sentir ; contre la littérature industrielle, celle qui est signée par un style, etc. Parce qu’elle est coextensive à un champ préalablement reconnu, la logique indiciaire favorise les redécouvertes et les reclassements, au risque de verser dans un élitisme antidémocratique et dans l’esthétisme.


Les ambivalences de la valorisation (économique) chez Les Goncourt

par Alexandre Péraud

La question des valeurs (esthétiques, morales…) occupe une place centrale dans le discours des Goncourt, valeurs qui, pour être « inestimables », sont régulièrement confrontées à la valeur monétaire ou marchande. Mais pour n’en pas rester à ce conflit stéréotypé (la prosaïque marchandise contre les biens de l’esprit, la raison bourgeoise contre la sensibilité…), peut-être faut-il déplacer notre regard vers la problématique latente de la valorisation économique. Dans les romans comme dans le Journal, on s’interroge en effet sans cesse sur ce qui fonde la valeur : celle des œuvres bien sûr, mais aussi des individus, et des femmes en particulier. En dramatisant le conflit entre ces différentes sources de la valeur que sont le travail, l’utilité ou le désir…, les Goncourt ne s’inscrivent pas seulement au cœur d’un débat essentiel pour la science économique de leur époque. Leurs récits mettent en texte la rupture moderne au terme de laquelle, comme le dira Simmel, « la valeur constitue en quelque sorte le pendant de l’être ».


Edmond de Goncourt et l’art japonais

par Koseï Ogura

On sait qu’Edmond de Goncourt s’est intéressé à l’art japonais tout au long de sa vie et qu’il a publié deux monographies : Outamaro en 1891 et Hokousaï en 1896. Ces deux ouvrages sont la réalisation d’une grande ambition qu’il avait manifestée le 25 mai 1888 dans son Journal : « je voudrais écrire sur l’art japonais un livre dans le genre de celui que j’ai écrit sur l’art du XVIIIe siècle, un livre moins documentaire, mais un livre encore plus poussé vers la description pénétrante et révélatrice des choses ». Pour mener à bien son projet, Edmond s’est fait aider par Hayashi Tadamasa. Brigitte Koyama-Richard, dans Japon rêvé, a bien montré ce qu’Edmond lui doit et l’histoire de leur collaboration. Dans ma communication, je vais m’interroger sur Edmond de Goncourt en tant que critique d’art en étudiant Outamaro et Hokousaï ainsi que La Maison d’un artiste pour essayer de mettre en relief les valeurs esthétiques qu’il a découvertes dans l’art du Japon, valeurs à la fois semblables à celles de l’art français au XVIIIe siècle et tout à fait originales par rapport à elles. Les deux monographies se présentent en apparence comme une suite de chapitres fragmentaires commentant les œuvres des deux peintres, suivis d’une liste détaillée. Mais on peut déceler dans les descriptions d’Edmond une expérimentation de l’écriture artiste dont on mesurera la portée par rapport à l’ensemble des œuvres des Goncourt.

 Outamaro et Hokousaï  ne sont pas illustrés, il est donc difficile pour le lecteur d’avoir une idée précise de la correspondance entre les descriptions d’Edmond et les œuvres commentées. Heureusement Outamaro et Hokousaï ont été traduits en japonais, respectivement en 2005 et en 2019, avec de riches illustrations pour Outamaro; la traductrice a identifié la plupart des œuvres d’art décrites par Edmond ! Ce travail permet de mieux saisir ce que l’écrivain a vu réellement et dans quelle mesure ses jugements esthétiques sont pertinents.


Rocaille : Baudelaire et Manet lecteurs des Goncourt

par Stéphane Guégan

La composante rocaille de la modernité baudelairienne a suscité une attention croissante depuis les travaux de Georges Blin. Il en va de même des multiples incursions de Manet dans l’art du premier XVIIIe siècle et dans la recréation du mundus muliebris propre à Watteau, Boucher ou Fragonard. Tous deux, le poète et le peintre, devenus amis en 1862, ont été des lecteurs des frères Goncourt. Cette année-là, Baudelaire, la plume en main, a proprement dévoré La femme au XVIIIe siècle et en a nourri sa réflexion sur les liens entre l’art moderne et les mœurs changeantes de la société civile. Moins de vingt ans plus tard, depuis Bellevue, site idoine, Manet se procure certains fascicules de L’art du XVIIIe siècle. Dans l’intervalle, qui a vu le style Louis XV refleurir partout et défier les ultimes résistances à son regain, le peintre n’a cessé de donner des gages à cette révision des valeurs esthétiques qui se double, pour lui, mais aussi pour Baudelaire et Mallarmé, de la promotion d’un Beau « à la Française ». 


Les vêtements masculins chez les frères Goncourt : portée sociale et valeur esthétique

par Nao Takaï

Dans Le Journal, les remarques sur les vêtements masculins abondent : l’habit noir, la cravate blanche et le gilet de flanelle y sont souvent évoqués comme connotant la bourgeoisie. Les deux frères se posent aussi la question du dandysme. Proches d’écrivains comme Baudelaire, Huysmans entre autres, ils n’ont pas eux-mêmes choisi le dandysme. Nous nous pencherons sur les raisons de leur prise distance. Ces analyses permettront enfin de dégager la position unique des deux frères comme écrivains dont l’approche ouvre la voie à l’esthétique naturaliste et décadente, entre romantisme et symbolisme, qui s’enracine dans les principes qu’ils estiment et incarnent eux-mêmes.


Valeurs du suicide chez les Goncourt

par Sébastien Roldan

En 1857 les Goncourt notent dans le Journal une mode pour le moins curieuse : celle de ces mondaines qui, pour s’attirer les grâces de la bonne fortune, se rendent rue de la Vieille-Lanterne « touch[er] le barreau » de la grille d’égout « où s’était pendu Gérard de Nerval ». Se pose alors la question de la valeur du suicide à leur yeux : ici le rituel superstitieux semble à la fois constituer le pittoresque de ce qui a été saisi sur le vif et qui mérite d’être consigné, et prêter le flanc à quelque dédain rationaliste et misogyne. Mais peut-on généraliser cette observation ? Qu’est-ce que l’œuvre goncourtienne révèle du suicide ? Que représente la mort volontaire à leurs yeux ? Cette image est pérenne ou suit-elle une évolution à travers la carrière littéraire des deux frères ? Notre contribution a pour objectif de fournir quelques réponses à ces interrogations.


Les frères Goncourt sont-ils fraternels ?

par Stéphane Gougelmann

Chez les Goncourt, l’adelphie n’est pas une simple configuration familiale : elle est un mode d’existence et d’écriture, une façon d’être au monde et à la littérature. Mais être frères et s’en prévaloir signifie-t-il que la fraternité soit érigée en paradigme éthique voire en fondement politique ? 

Mise à l’épreuve par le libéralisme prégnant qui favorise l’individualisme et l’esprit concurrentiel, la fraternité peut apparaître, dans leurs écrits, comme un principe illusoire. D’autres modèles de solidarité leur paraissent d’ailleurs socialement préférables, le sentiment d’égalité qui s’éprouve dans la fraternité étant peu compatible avec leurs préjugés aristocratiques et leur haine de la Révolution. Néanmoins, renonceraient-ils à toute fraternité au-delà d’eux-mêmes ? Une forme de confraternité existe sous le Grenier ou dans le projet de l’Académie. La critique artistique sert aussi à fraterniser avec les peintres qu’ils admirent. Quant à leur style, il instaure une connivence avec le lecteur, ce « frère », selon la formule de Baudelaire. In fine, la fraternité, dans le système de valeurs des Goncourt, est moins une vertu morale qu’une convergence de goût, une affinité élective entre âmes artistes.


Plaidoyer pour une héroïne sans qualité. « La Fille Élisa » ou « l’art de parler au cœur et à l’émotion »

par Émilie Sermadiras

Dans la préface de La Fille Élisa, Edmond de Goncourt présente son roman comme un « plaidoyer » ayant pour ambition de « parler au cœur et à l’émotion [des] législateurs » pour les inviter à porter un regard critique sur le système pénitentiaire en général, et la règle du silence continu en particulier. Cependant, cette finalité exemplaire est éminemment problématique. Le récit a en effet pour héroïne un personnage dénué de toute qualité morale, dont le crime échappe largement à l’analyse, et donc au jugement. Certes, cette neutralité axiologique s’explique par la volonté d’analyser le personnage sous un angle objectif, médical, conformément aux exigences de la poétique naturaliste. Mais il n’en reste pas moins que cela brouille la valeur exemplaire du cas romanesque. La question se pose alors de savoir comment le romancier tient la gageure de susciter chez le lecteur un sentiment de commisération pour les malheurs d’une héroïne « sans qualité » afin de faire de son parcours le support d’une réflexion sociale, politique et éthique 


« Salto mortale » ou la périlleuse vision de l’homme de lettres chez les Goncourt

par Jean-Didier Wagneur

Jules et Edmond de Goncourt ont consacré deux romans à la bohème. En 1860, Charles Demailly s’en prend à la bohème médiatique et sept ans plus tard Manette Salomon porte un regard critique sur celle des arts. Publié en 1879, le roman Les Frères Zemganno semble paradoxal. Edmond donne pour cadre à son roman-tombeau pour Jules la bohème originelle des saltimbanques. Nous nous interrogerons sur la permanence de cette approche postromantique au contact des figures du clown fin de siècle dans la constante recherche des deux frères d’une définition de l’écrivain.


Valeurs de l’échec : (auto)portrait des Goncourt en auteurs sifflés

par Marie-Astrid Charlier

La passion des frères Goncourt pour le théâtre n’est plus à démontrer, tout comme les « fours » qu’ils ont subis, d’Henriette Maréchal à la Comédie-Française le 5 décembre 1865 à Germinie Lacerteux à l’Odéon en 1888 puis Charles Demailly au Gymnase le 19 décembre 1892. Que ce soit avec du théâtre de création (A bas le progrès !, 1893), d’adaptation ou des adaptations autorisées, les Goncourt ont tenté de s’imposer dans le paysage dramatique de la seconde moitié du XIXe siècle. Souvent refusées sur les grandes scènes parisiennes, leurs pièces ont trouvé refuge au Théâtre-Libre d’André Antoine, un des plus fameux « théâtres à côté » de la fin du siècle, où les « petits » naturalistes ont adapté Sœur Philomène (Vidal et Byl, 1887), Les Frères Zemganno (Alexis et Méténier, 1890) ou encore La Fille Elisa (Ajalbert, 1890). À partir des travaux pionniers d’Anne-Simone Dufief et de Jean-Pierre Sarrazac sur le tournant « naturalo-symboliste », ma communication propose d’étudier la posture d’auteurs sifflés que les Goncourt, puis Edmond seul, ont construite et jouée, notamment dans leur Journal et leur correspondance. Il s’agira de cerner les valeurs qu’ils attachent à leurs multiples échecs scéniques et de comprendre les fonctions du retournement de la contrainte imposée par le champ théâtral (pièces refusées et/ou sifflées) en valeur littéraire, artistique et dramatique. 


Valeur de l’inactualité

par Véronique Samson

Les romans de Jules et Edmond de Goncourt sont peuplés d’être inactuels, qui ne coïncident pas tout à fait avec leur présent. Certains, comme Mlle de Varandeuil, naissent à la fiction dans ce décalage ; d’autres atteignent progressivement l’inactualité au fil de l’intrigue, pour ne plus exister que dans leur propre passé. Par l’étude de ces trajectoires intempestives, cette communication propose que le temps fait bel et bien partie des modes d’évaluation des frères Goncourt et, plus exactement, que l’inactualité est l’une des valeurs de cette œuvre pourtant attentive à la modernité


« La Femme au XVIIIe siècle » : histoire ou fantasme ?

par Robert Kopp

Pour les Goncourt, la femme du XVIIIe siècle est l’exact opposé de celle du XIXe. Au siècle français par excellence, à sa culture aristocratique portée par des femmes, ils opposent le siècle de la démocratie et de la vulgarité, incarné par la prostitution. En dépit d’une documentation souvent inédite, aussi abondante que sérieuse, leur ouvrage dépasse les limites de l’histoire pour devenir un élément de leur mythologie personnelle. Il participe ainsi à leur définition de la modernité, qui rejoint sur plus d’un point celle d’un de leurs premiers lecteurs, Baudelaire, qui comptait utiliser leur travail dans l’élargissement de son étude, Le Peintre de la vie moderne, consacrée à Constantin Guys.


Épigones d’outre-mer : les valeurs goncourtiennes dans la littérature brésilienne

par Zadig Gama

Tout au long de la deuxième moitié du XIXe siècle, l’œuvre d’Edmond et de Jules de Goncourt circule au Brésil en français et en portugais. Lors des dernières décennies du XIXe siècle et des premières décennies du XXe, les valeurs esthétiques de leurs ouvrages sont identifiées, appréciées, voire appropriées par une partie de la communauté lettrée brésilienne. Il s’agit de valeurs morales et esthétiques rattachées à la laïcité et à l’atténuation du romanesque ainsi que d’un style fait d’une écriture recherchée, fondée sur l’observation et sur des documents. La critique brésilienne en donne un aperçu et indique un réseau de jeunes écrivains épigones des Goncourt, qui opèrent des transferts de ces valeurs dans leurs romans : Lar (Foyer, 1888) de Pardal Mallet, Flor de sangue (Fleur de sang, 1897) de Valentim Magalhães, et O Simas (Le Simas, 1898) de Pápi Junior. Ou encore dans le conte “Confissão de uma noiva” (« Confessions d’une fiancée », 1914) d’Arthur Azevedo, où la lecture de Chérie éveille chez la protagoniste sa curiosité sur la nuit de noces. On évoquera aussi le pastiche des frères Goncourt chez quelques écrivains-journalistes, comme Escragnolle Dória dans le recueil de contes Dor (Douleur, 1903) et dans ses séries d’études sur des chanteurs et musiciens contemporains.


La Révolution dans la famille et la dissolution des liens du sang chez les Goncourt

par Peter Vantine

Cette intervention étudiera le rôle de la famille dans l’œuvre des frères Goncourt. Dès la publication de leur plaquette Les Révolutions dans les mœurs (1854), les auteurs déclarent la centralité de la famille dans leur système de valeurs et déplorent la dégradation des structures familiales, des mœurs traditionnels au sein de la famille, et du rôle de la famille dans la société du dix-neuvième siècle. Selon les Goncourt, la perte de respect pour la paternité — chez les enfants, les femmes ambitieuses et les pères eux-mêmes — et la rupture avec le passé par l’oubli de l’héritage familial participent au renversement des hiérarchies qui entraîne la déstabilisation de la société, voire le désordre social. J’examinerai les propos volontairement provocatrices et réactionnaires de La Révolution dans les mœurs, des observations sur la famille dans le Journal, et la manière dont les auteurs développent leurs idées sur la famille dans leur fiction.


En haine de la philanthropie

par Pierre Dufief

Les Goncourt sont des moralistes qui ont une vision très pessimiste de l’homme. Marqués par l’influence de Gavarni, ils dénoncent la croyance au progrès, à la bonté d’une humanité qu’ils peignent au noir dans leur Journal et dans leurs romans. Les Goncourt sont assurément des misanthropes, malgré leur besoin de sociabilité, bien plus que des philanthropes.

Ils ont critiqué le XVIIIe siècle des philanthropes, sa sensiblerie et ses dangereuses illusions qui ont amené les violences de la Révolution. Ils ont constamment affiché leur refus des idéaux humanitaires de 1848, dénonçant le rôle ravageur des grands mots (humanité, charité, fraternité) au nom desquels tant de crimes ont été commis ; ils ont rejeté les abstractions pour privilégier les cas concrets. Leur réalisme politique les a rendus critiques à l’égard des luttes en faveur des peuples opprimés (Pologne) et du christianisme romantique. La République, fondée, selon Edmond, sur le mensonge de « la fraternité universelle, n’a pas trouvé grâce à ses yeux.

Les philanthropes, loin de concourir au bonheur des hommes, ont accru leur souffra nce par un souci de rationalisation systématique. Le système pénitentiaire moderne, calqué sur le modèle américain et dénoncé dans La Fille Elisa, est bien plus inhumain que les anciens châtiments. Si l’Amérique et ses philanthropes sont critiqués, l’Italie et ses pratiques d’une charité de proximité, à l’ancienne, sont valorisées. Les Goncourt figent les vraies valeurs dans la période pré-révolutionnaire. N’est-il pas significatif qu’ils évoquent dans leur préface de Germinie Lacerteux le spectacle de ces misères que « les reines autrefois faisaient toucher de l’œil à leurs enfants dans les hospices » ?


Entre regrets et sarcasmes, les Goncourt et la religion

par Stéphanie Champeau

Du Journal aux romans, l’œuvre des frères Goncourt est traversée de réflexions autour de la religion. Si leur position personnelle à ce sujet (d’après, du moins, ce que l’on peut en percevoir) ne change guère au fil du temps -position qui est celle d’un agnosticisme (plus que d’un athéisme « dur », sorte de foi à rebours qu’ils rejettent) de bon aloi chez les artistes et « intelligences » d’élite auxquels ils se sentent appartenir et veulent être identifiés, beaucoup de passages du Journal, et surtout leur dernier roman écrit en commun, Madame Gervaisais, dont on pourrait dire (en reprenant une expression de Marc Fumaroli à propos des Mémoires d’Outre-Tombe à l’égard de René) qu’il est la « géniale amplification » de leur fascination, de leurs fantasmes et de leurs projections à l’égard de la religion (tout ensemble comme foi, comme fait de société, et comme source de culture et de civilisation), attestent qu’ils ne se sont pas cantonnés dans la confortable « indifférence en matière de religion » vitupérée en son temps par Lamennais. S’il est impossible de trouver chez eux la moindre foi en l’Incarnation, si leur approche de Jésus est, en gros, celle de Renan, les choses sont moins nettes en ce qui concerne la possibilité d’un Dieu créateur, et, surtout, en ce qui concerne l’évaluation des effets de la religion. Ici, l’esprit des Lumières, les souvenirs du roman noir, le mythe « jésuite » entrent en conflit avec l’héritage de Chateaubriand et de Lamennais développant l’apport culturel et civilisationnel inestimable du christianisme, source du beau moderne, de la mélancolie, de la sensibilité, de l’émotion… Tout cela forme un ensemble contrasté, pas toujours cohérent mais infiniment suggestif, qui dit beaucoup aussi sur leur temps et la place qu’y tint le fait religieux. 


Les Goncourt ou l’impossible reconnaissance

par Chantal Pierre

Les Goncourt aiment-ils le peuple ? eux qui se sont illustrés dans la représentation de ses figures souffrantes et dévoyées (Germinie, Elisa) avant de tourner la page pour ne plus s’intéresser qu’à des figures plus distinguées, comme La Faustin ou Chérie. La question, un peu grossière, mérite d’être posée dans le cadre d’une confrontation entre valeurs chrétiennes et valeurs humanitaires, telles qu’elles s’énoncent entre 1848 et 1870. S’ils fustigent, dans leur Journal, les « bruyants aimeurs de peuple » de leur époque (Journal, décembre 1860), ils lui opposent « la grandeur simple » de la religion chrétienne qui porte secours au peuple souffrant. Si Baudelaire renvoie dos-à-dos dans « Assommons les pauvres » justice sociale et charité chrétienne, les frères semblent sauver la charité du désenchantement, faisant d’elle une valeur, autant éthique qu’esthétique, à travers laquelle il est possible d’aimer le peuple, non pas comme corps politique, mais corps souffrant. 


« Idées et sensations » ou le système aphoristique des valeurs goncourtiennes

par Federica D’Ascenzo

Si les Goncourt pratiquèrent tous les genres, ils le firent dans l’optique de les renouveler, de les plier à exprimer leur vision du monde et de la modernité, mais surtout au nom d’une science des mœurs dont toute forme d’art devait selon eux être porteuse. Éthique et esthétique ont pour les deux frères partie liée, qu’il s’agisse du roman, devenu «Histoire morale contemporaine» ayant assimilé «les études et les devoirs de la science» pour rechercher «l’Art et […] la Vérité», du théâtre devant contraster l’engouement du public pour les dramaturges scandinaves et remettre à l’honneur «les qualités françaises», ou encore de l’écriture diaristique chargée de portraiturer les hommes dans le fugitif et le provisoire de l’impression d’un instant pour «représenter l’ondoyante humanité dans sa vérité momentanée». Quel que soit le genre que les Goncourt choisissent, celui-ci devient le lieu d’une bataille où l’horizon d’attente du public compte moins que la nécessité d’exprimer de façon fidèle le résultat de leur anatomie du réel. La distinction et la vocation, qui caractérisent le nouveau statut de l’artiste moderne, apparaissent ainsi comme les garantes de l’authenticité des valeurs exprimées, au prix d’un labeur sans égal et d’une réception fluctuante. Antimodernes devenus pourtant témoins de la modernité, Edmond et Jules de Goncourt revendiquent la cohérence systémique et le caractère moral de leur production littéraire où rien n’est laissé au hasard.

Idées et sensations n’échappe pas à cette double exigence. Dans cette œuvre en général délaissée, les deux écrivains ont réinterprété la forme brève, bien plus dans la lignée de Chamfort que de Joubert ou de La Rochefoucauld. L’hybridation formelle qu’ils mettent en place tient de l’aphorisme, qui deviendra la forme moderne de la brièveté, partagé entre la pensée qui aspire à l’universalité et la sensation en tant qu’impression observée, étudiée et analysée. Leurs idées oscillent entre une vérité apparemment générale et une affirmation de l’individualité et de la singularité ; leurs impressions se construisent autour de l’anecdote et du portrait, mais intègrent le paradoxe, imprimant une valeur circonstancielle et relative à l’énoncé et se prêtant à l’expression de la distinction. Écriture tiraillée entre l’impression de finitude et celle de l’incomplétude, elle se veut le produit de l’immédiateté autant que de l’ironie et une déclinaison de l’esthétique du morcelé, de la touche impressionniste ou de la fragmentation typique de leur esthétique. Un système de valeurs se dessine inévitablement: la forme s’y prête, en se distinguant du Journal et en poursuivant un objectif plus explicite; les sujets abordés tracent les contours de tout l’univers goncourtien.


La jouissance masquée ou « la peine du style »

par Véronique Cnockaert

La satisfaction des appétits décris dans les romans dits réalistes ou naturalistes sont un passage obligé. Cependant quand est-il vraiment de la jouissance et de sa représentation romanesque ? Chez les Goncourt, dans les romans ou dans le Journal, s’élabore une clinique de la jouissance, qui va des affects du corps — qui ne craignent pas la démesure allant jusqu’à s’opposer au plaisir (ainsi l’abnégation douloureuse d’Élisa pour son commis-voyageur) — à la jouissance quasi mortifiée de l’écrivain, « mort du travail de la forme, à la peine du style » (J., 22 juin 1870).

Cet article aimerait cerner cette jouissance masquée dans quelques romans (Renée Mauperin, La Fille Élisa, Madame Gervaisais) et dans Le Journal (extraits) afin de révéler (ou non) une économie singulière de la jouissance qui va de la transgression par le corps à celle sublimée, mais non moins réelle, par et de l’écriture.



Non

Félix Nadar (1820-1910) – Portrait d’Edmond et Jules Goncourt

France-Amérique latine : littérature et sciences humaines (1945-2022)

INTRODUCTION

Colloque organisé par les universités de CY Cergy Paris et Nantes, en collaboration avec les universités de Londrina, Natal, Sao Paulo (Brésil) et de La Paz (Bolivie).

Ces rencontres se donnent pour objet de faire le point sur les très riches échanges culturels entre la France et les pays d’Amérique latine dans le domaine littéraire, depuis la Seconde Guerre Mondiale jusqu’à nos jours. Par « littéraire », on entend autant la littérature à proprement parler (du récit fictionnel à la poésie, en passant par l’essai) que l’ensemble des sciences humaines, étant donné la forte corrélation entre ces domaines tout au long de la période étudiée (entre l’existentialisme et la déconstruction, en passant par le structuralisme et les différentes variables du poststructuralisme) 

On connaît la passion pour la littérature que partagent les acteurs du monde culturel des deux côtés de l’Atlantique, l’intensité des voyages d’écrivains entre les grandes capitales du monde latin. On connaît bien la French theory, la diffusion de la pensée française d’après-guerre et son appropriation créatrice dans le monde hispanophone, lusophone et anglophone. Aussi curieux que cela puisse paraître, il n’existe aucun travail de synthèse sur l’influence et la transformation de la pensée française en Amérique latine, aussi bien dans le monde hispanophone que dans le monde lusophone. Ce colloque propose un ensemble d’interventions filmées et diffusées sur le site de la Fondation Singer Polignac dont on espère qu’il servira de référence dans le domaine.

La notion d’échange suppose que l’on s’intéresse également à l’empreinte des pratiques francophones (l’Afrique ou la Caraïbe, si proche géographiquement et culturellement de l’Amérique latine) et que l’on accorde une place importante à la manière dont les cultures latino-américaines trouvent un écho en France et ailleurs. La littérature latino-américaine a connu une réception considérable à Paris (en particulier le roman) – réception qui a touché toute l’Afrique francophone, au nord ou au sud du Sahara. Ainsi, le « réalisme merveilleux », le néo-baroque latino-américain ont nourri de nombreux écrivains en quête de nouvelles formes d’écriture, moins orientées vers la culture française.

Seront ainsi abordés les œuvres et la réception d’écrivains et intellectuels aussi divers que Bourdieu, Borges, Carpentier, Deleuze, Foucault, Garcia Marquez, Glissant, Kourouma, Lévi-Strauss, Mammeri – autant de noms qui témoignent de la permanence et de l’intensité du dialogue culturel. 

Une place particulière sera réservée à Roland Barthes dont la réception reste particulièrement vivante aujourd’hui.

Programme

Lundi 9 mai

13h30 – Accueil

14h – Introduction par Claude Coste, Gustavo Guerrero et Régis Tettamanzi

Séance 1 : Roland Barthes

17h – fin de la première journée


Mardi 10 mai 

10h – ouverture de la deuxième journée

Séance 1 : Roland Barthes
Séance 2 : Sciences humaines

13h-14h – Déjeuner

Séance 3 : Arts et littérature

17h – fin de la deuxième journée


Mercredi 11 mai

10h30 – ouverture de la troisième journée

Séance 3 : Arts et littérature

13h-14h – Déjeuner

16h : clôture du colloque

Biographies

Claude Coste

Claude Coste est professeur de littérature française et francophone à l’université CY Paris Cergy. Sa recherche porte principalement sur l’œuvre de Roland Barthes (Roland Barthes moraliste, 1998, Bêtise de Barthes, 2012, Roland Barthes ou l’art du détour, 2016) et sur les relations de la littérature et de la musique (Les Malheurs d’Orphée, 2003, Orphée ou les Sirènes, 2014). En 2015, il a co-organisé le colloque « Barthes et la musique » à la Fondation Singer Polignac ; toujours en 2015, il a participé aux colloques du centenaire qui se sont tenus à Sao Paulo (« Barthes Plural ») et à La Paz (« Roland Barthes amateur »).


Laura Brandini

Laura Brandini est professeure des Littératures Française et Comparée à l’Université de Londrina. Sa formation académique, obtenue à São Paulo, Genève et Paris, porte sur les rapports entre le Brésil et la France, aussi bien que sur l’œuvre de Roland Barthes. 


Gustavo Guerrero

Gustavo Guerrero est professeur d’Histoire Culturelle et de Littérature hispanoaméricaine contemporaine à l’Université CY Cergy Paris et à l’Institut d’Études Politiques de Saint-Germain-en-Laye. Parallèlement il est le conseiller littéraire de la maison Gallimard pour le monde hispanique et lusophone à Paris. Il est auteur des essais La estrategia neobarroca (Barcelone, 1988), Itinéraires (Caracas 1997), La religion du vide (Mexico, 1998), Poétique et poésie lyrique (Paris, 2001), Historia de un encargo : La Catira de Camilo José Cela (Barcelone, 2008), et Paisajes en movimiento, literatura y cambio cultural entre dos siglos (Buenos Aires, 2018). Actuellement il dirige le projet interuniversitaire « Médiation éditorial, diffusion et traduction de la littérature latino-américaine en France » (MEDET LAT) à l’École Normale Supérieure de Paris.


Régis Tettamanzi

Régis Tettamanzi est professeur de littérature française du XXe siècle à l’université de Nantes. Ses travaux de recherche sont d’orientation sociocritique. Il s’est d’abord intéressé à la littérature romanesque et polémique du XXe siècle, en particulier l’œuvre de Louis-Ferdinand Céline (Esthétique de l’outrance. Idéologie et stylistique dans l’œuvre de L.-F. Céline, 1999). Il a publié la première édition critique des pamphlets de Céline (Écrits polémiques, Québec, Éditions 8, 2012). Il travaille également sur les représentations du Brésil dans la littérature française contemporaine, domaine auquel il a consacré deux ouvrages (Les Écrivains français et le Brésil, la construction d’un imaginaire de La Jangada à Tristes tropiques, 2004 ; Le Roman français et l’histoire du Brésilessai sur l’exotisme littéraire, 2007), une anthologie (Le Voyage au Brésil, coll. Bouquins, 2014) et de nombreux articles.


Márcio Venício Barbosa

Márcio Venício Barbosa est professeur de Littérature française à l’Université fédérale du Rio Grande do Norte, au Brésil, dirige le groupe de recherches « L’écrivain pluriel : études pluridisciplinaires de l’œuvre de Roland Barthes ». Son travail à présent porte sur l’œuvre de Leyla Perrone-Moisés et ses rapports avec les idées de Roland Barthes.


Marcelo Villena Alvarado

Marcelo Villena Alvarado est enseignant-chercheur au département de Littérature et à l’Instituto de Estudios Bolivianos de l’Universidad Mayor de San Andrés, à La Paz, en Bolivie. Il a publié Las tentaciones de San Ricardo, siete ensayos para la interpretación de la narrativa boliviana del siglo XX (2004, 2011) ; El preparado de yeso: Blanca Wiethüchter, una critica afición (2014) ; Roland Barthes, el deseo del gesto y el modelo de la pintura (2015, versión en espagnol de la thèse soutenue à Paris vii en 2010) ; en collaboration : Roland Barthes Amateur (2016, actes du colloque tenu à La Paz en 2015).


Claudia Amigo Pino

N.C


Ester Pino Estivill

Ester Pino Estivill est enseignante de théorie littéraire et littérature comparée à l’Université de Barcelone. Elle a publié plusieurs articles sur la réception de Roland Barthes dans la critique hispanophone et sur les relations littéraires et théoriques entre la culture catalane et la culture française. Elle est membre de l’équipe de recherche Littérature Comparée dans l’Espace Intellectuel Européen (UB).


Corinne Blanchaud

Corinne Blanchaud, maître de conférences, enseigne la littérature de langue française et la théorie littéraire au département de lettres modernes de l’université de Cergy-Pontoise. Elle est membre de l’UMR Héritages. Ses publications concernent principalement la prose poétique de langue française contemporaine et la génétique des textes : Pour la poésie. Poètes de langue française, XXème-XXIème (C. Blanchaud & Cyrille François, dir., Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, « Littérature hors frontière », 2016, 480 p.) ; elles abordent également l’histoire littéraire et l’histoire des idées (Classique ou francophone ? De la notion de classique appliquée aux œuvres francophones, C. Blanchaud, dir., Amiens, Encrage, « CRTF », 2015, 141 p.). En 2022, deux ouvrages sont en cours d’édition, avec Pierre-Henri Kleiber, Les Revues de poésie à l’épreuve du monde contemporain : un lieu d’expérience et de genèse poétiques aux Presses universitaires de Rennes ; et une édition de la correspondance de Jean-Michel Reynard et André du Bouchet aux éditions Le Bruit du temps.


Max Hidalgo

Max Hidalgo Nácher enseigne la Théorie de la Littérature et la Littérature Comparée à l’Universitat de Barcelona (UB). Il consacre sa recherche à l’œuvre et aux réseaux intellectuels d’Haroldo de Campos ainsi qu’à l’histoire et aux usages de la théorie littéraire. Il a publié, entre d’autres, des articles sur Roland Barthes, Samuel Beckett, José Bergamín, Haroldo de Campos, Oscar Masotta, Leyla Perrone-Moisés et Nicolás Rosa, et dirigé les dossiers « Historia y usos hispánicos de la teoría » (452ºF, 2015) et « Circulações da teoria na América Latina » (Landa, 2019). Il a fait séjours de recherche à l’Universidad Nacional de Rosario (2013), Universidade de São Paulo (2015 et 2017), Centro de Referência Haroldo de Campos (2018), Harvard University (2016) et à l’École Normale Supérieure (2021), cette dernière en tant que chercheur invité du Programme DEA de la Fondation Maison des Sciences de l’Homme. Il vient de publier le livre Teoría en tránsito. Arqueología de la crítica y la teoría literaria españolas de 1966 a la posdictadura (Santa Fe, Universidad Nacional del Litoral, 2022), premier volume d’une recherche sur Los estudios literarios en Argentina y en España: institucionalización e internacionalización, coordiné avec Analía Gerbaudo.


Magdalena Campora

Magdalena Cámpora est chercheuse au CONICET (Consejo Nacional de Investigaciones Científicas y Técnicas) et professeure de Littérature française à l’Universidad Católica Argentina. Elle prépare actuellement un livre sur les transformations éditoriales et les usages idéologiques de la littérature française en Argentine au XXème siècle : El intérprete imprevisto. Clásicos franceses en ediciones populares argentinas (1901-1955).

Publications récentes :

Articles “Voltaire”, “Balzac”, “Flaubert”, “Rimbaud”, “Bacourt”, “La literatura francesa, el francés y Borges”, Borges babilónico, sous la dir. de Jorge Schwartz, Buenos Aires, Fondo de Cultura Económica, à paraître (éd. Brésil : Borges Babilônico. Uma enciclopédia, São Paulo, Companhia das Letras, 2017).

La Nación, el Segundo Imperio y la Tercera República. Pedagogía cultural y novela francesa en la Argentina (1901-1920)”, Mélanges de la Casa de Velázquez, à paraître.

“« La Croix du Sud » en el cielo contemporáneo. Novísimos latinoamericanos en Francia”, en Novísimas. Las narrativas latinoamericanas y españolas del siglo XXI, sous la dir. de Ana Gallego Cuiñas, Madrid, Iberoamericana-Vervuert / Berlin, De Gruyter, 2021, pp. 346-366.

 “¿La versión de Babel? Imaginarios de lengua y traducción en la Argentina, 1900-1938”, Scènes de la traduction France-Argentine, sous la dir. de Roland Béhar et Gersende Camenen, Paris, ENS/Éditions Rue d’Ulm, 2020, pp. 25-47.

Direction de Letras, nro 81 (2020): “Borges, sus ensayos: lógicas textuales y archivos de época”.

Direction de Anales de Literatura Hispanoamericana, vol. 49 (2020), (co-direction avec Guadalupe Silva): “Campos en tensión: política, estética e importación cultural en el Cono Sur (1930-1990)”.

Raúl Gustavo Aguirre y René Char, Correspondencia y poemas, Buenos Aires, Edhasa, 2016.

Borges–Francia, (co-direction avec Javier Roberto González), Buenos Aires, Selectus, 2011, 535 p.


Mabel Morana

Mabel Moraña is Willliam H. Gass Professor of Arts and Sciences at Washington University in St. Louis, where she is the Director of the Latin American Studies Program. She has been Director of Publications of IILI (Instituto Internacional de Literatura Iberoamericana) and has published extensively on Latin American literature from the colonial period to the present, including topics of cultural theory, literary and cultural criticism, narrative and philosophy. She has published 20 authored books. Among them: Arguedas/Vargas Llosa: Debates and Assemblages (awarded with the Singer Kovacs Award, MLA, and the Premio Iberoamericano, LASA); The Monster as War Machine; and Philosophy and Criticism in Latin America. From Mariategui to Sloterdijk. Her latest books are Líneas de fuga. Migración, frontera y sujeto migrante (800 pp., 2021); Pensar el cuerpo. Historia, materialidad y símbolo (2021) y “Nosotros, los barbaros”. Tres escritores mexicanos en el siglo XXI (2022)


Ignacio Sanchez-Prado

Ignacio M. Sánchez Prado ocupa la cátedra Jarvis Thurston and Mona van Duyn en humanidades en Washington University in St. Louis, Missouri, Estados Unidos. Es parte del cuerpo docente de los programas de estudios latinoamericanos y de literaturas hispanohablantes. Su trabajo de investigación se centra en cuestiones teóricas, críticas e institucionales relacionadas a la literatura y el cine de México en particular, y de América Latina de manera más general. Es autor de siete libros y editor de quince. Entre sus más recientes volúmenes se encuentran Strategic Occidentalism. On Mexican Fiction, the Neoliberal Book Market and the Question of World Literature y Mexican Literature as World Literature. Sus artículos han aparecido en revistas académicas de las Américas, Europa y Asia, así como en el Washington Post, el Los Angeles Review of Books y otras publicaciones.


Chantal Lapeyre

Chantal Lapeyre est Professeur de littérature contemporaine/Création littéraire et artistique. Elle mène des recherches sur les liens entre danse (baroque et contemporaine) et littérature, ainsi que sur les usages du « baroque » – le mot et la chose- dans la période contemporaine. Elle a publié plusieurs ouvrages sur Pascal Quignard, la littérature contemporaine et la danse, ainsi que Fictions nécessaires – Pour une danse baroque contemporaine, aux Editions du CND, en 2021.


Renée-Clémentine Lucien

Renée Clémentine Lucien est agrégée d’espagnol, docteure en Études romanes, spécialiste de la littérature, de la civilisation et des arts de l’Amérique latine et de la Caraïbe (XIX – XXIe siècle). MCF à l’université Paris Sorbonne, elle est chercheuse au CRIMIC et au GRIAHAL. Elle travaille sur les identités, la transculturalité, la théorie littéraire. Elle a publié Résistance et cubanité (2006), co-dirigé Regards sur 50 ans de vie culturelle avec la Révolution cubaine avec Julie Amiot-Guillouet (2010), José Martí : de la Cuba esclavagiste à notre Amérique avec Sylvie Bouffartigue et Sandra Hernandez (2015), La novela de mi vida de Leonardo Padura (2020) et de nombreux articles sur des artistes et des écrivains de la Caraïbe hispanique et francophone. 


Andy Stafford

Andy Stafford, spécialiste de l’œuvre de Roland Barthes, mène des recherches sur les littératures francophones, surtout sur les formes brèves – essai, poème, conte – du Maghreb, de l’Afrique et des Antilles. Il vient de publier un chapitre sur le travail du jeune Abdelkébir Khatibi ; son étude sur La Revue du monde noir va paraître bientôt dans un volume sur « Les femmes et les revues ». Habilité à diriger des recherches par l’université de Grenoble-Alpes, il enseigne à l’université de Leeds au Royaume-Uni.


Khadidja Khelladi

Professeur à l’université Alger 2 et à l’École Normale Supérieure d’Alger où elle enseigne la langue, la littérature et la civilisation françaises, Khadidja Khelladi a soutenu un doctorat de 3°cycle sur « Le Discours mythique dans le théâtre de Kateb Yacine » et un doctorat d’État sur « Littérature orale et Imaginaire. Paradigmes de récits hilaliens ». Elle s’intéresse en particulier aux relations entre littérature et anthropologie. Ses corpus d’étude sont constitués par les littératures populaires, orales et écrites. Sa réflexion porte sur l’évolution et la contamination des motifs dans les mythes littéraires et leurs réécritures. Elle a participé à des ouvrages collectifs, a codirigé avec le professeur Claude Coste un numéro de la revue Recherches & Travaux de Grenoble sur les Mythes du Maghreb et du Machreq, a publié des articles dans les revues des Universités Alger 2, de Grenoble, de Limoges, de Lyon et dans les revues du CNRPAH (Centre National de Recherches en Préhistoire, Anthropologie et Histoire) où elle est chercheuse associée. Ses recherches actuelles portent sur les relations entre littérature, mythe et anthropologie.


Boussad Saim

Boussad Saim, maître de conférences à l’École normale supérieure de Bouzaréah (HDR) soutient, à l’Université de Grenoble-Alpes en 2013, sa thèse de doctorat qui porte sur « Les modes de signifiance du nom propre : l’exemple de Mouloud Mammeri, Yacine Kateb et Jean-Mari Gustave Le Clézio ». Dernières publications : 

  • « La célébration de la création dans La carte d’identité de J-M- Adiaffi, comme rempart de résistance face à l’Histoire », Résilience et modernité dans les littératures francophones, sous la direction de Marc Quaghebeur (Peter Lang, Bruxelles, 2021). 
  • « Quand la musique rime avec le bonheur du lieu dans L’invention du désert de Tahar Djaout », communication lors de la journée d’études Les lieux du bonheur : approches littéraires (Nantes, 2019, à paraître prochainement).
  • « Réflexion sur le récit de vie de l’œuvre », communication lors d’une journée d’études internationale (Tours en 2020) consacrée à Dynamiques et enjeux ethico-épistémologiques du récit de vie : réfléchir en termes d’expérience (à paraître prochainement).
  • « La parole poétique dans L’arbre à dires de Mohamed Dib ou comment se perpétue l’originaire », communication lors d’une journée d’études consacrée à Narration des origines dans les cultures du monde et dans les arts (actes du colloque à paraître chez Classiques Garnier en avril 2022).

Julie Amiot-Guillouet

Julie Amiot-Guillouet est ancienne élève de l’École Normale Supérieure de Fontenay-Saint-Cloud, agrégée d’espagnol, titulaire d’un doctorat en études romanes avec une thèse publiée sous le titre Amours, danses et chansons. Le mélodrame de cabaret au Mexique et à Cuba (années 1940-1950) chez Peter Lang en 2015 dans la collection « Repenser le cinéma ». Professeure des Universités et Directrice-adjointe de l’UMR 9022 Héritages (CY Cergy Paris Université, CNRS, Ministère de la Culture) depuis 2020, chercheure associée du laboratoire CRIMIC de Sorbonne Université, elle a publié divers articles sur le cinéma hispanique classique, moderne et contemporain, et dirigé trois ouvrages collectifs : Cuba. Cinéma et Révolution en 2006 avec Nancy Berthier ; 1959-2009 : regards sur 50 ans de vie culturelle avec la Révolution cubaine en 2012 avec Renée Clémentine Lucien, et Frente a la catástrofe. Temáticas y estéticas en el cine español e iberoamericano contemporáneo en 2017 avec Nancy Berthier. Elle est membre honoraire de l’Institut Universitaire de France où elle a développé un projet de recherche sur l’aide des fonds de soutien institutionnels européens au cinéma latino-américain. Elle a soutenu en 2017 une Habilitation à Diriger des Recherches dont le mémoire inédit porte sur « Le moment argentin du Fonds Sud (2004-2009) », production et réception d’un cinéma alternatif.


Gérard Macé

Auteur aux multiples talents, parfois traducteur et photographe, voyageur, Gérard Macé pratique divers genres littéraires, à travers une œuvre opulente. Il a reçu notamment le prix Roger Caillois pour Le goût de l’homme (Folio essais n° 651), ouvrage qui manifeste son vif intérêt pour l’Amérique du Sud et l’Afrique, le grand prix de poésie de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre poétique (2008) ; il a remporté, en décembre 2020, le prix de la critique littéraire 2020 Pen Club/ Brasserie Lipp pour son livre Et je vous offre le néant, une lecture de Sade. Gérard Macé est également l’auteur d’une anthologie, La pensée des poètes, parue en 2021 en Folio/essais.


Résumés de communication

Barthes, Sarduy et le baroque

par Claude Coste

Pendant longtemps, l’histoire littéraire française a négligé le baroque au bénéfice du classicisme (opposé à la seule préciosité). Soucieux de revendiquer et d’imaginer une forme de baroque à la fois historique et transhistorique, Barthes paradoxalement néglige les écrivains du XVIIe siècle pour se tourner vers un passé lointain (Tacite) ou vers d’autres horizons géographiques (le Maroc de Khatibi et Morsy). Mais s’il n’est jamais allé en Amérique du Sud et ne s’est guère intéressé à l’émergence culturelle de ce continent, c’est principalement en lisant l’œuvre de son ami l’écrivain cubain Severo Sarduy que Barthes va définir une forme d’écriture « baroque » qui cherche à décentrer la langue et s’émanciper des codes.


Barthes en Amérique Latine : une approche comparée

par Claudia Amigo Pino

Cette intervention a pour but de montrer les lignes générales de la circulation de l’œuvre de Roland Barthes en Amérique Latine, à partir d’une approche comparée de sa réception au Chili, en Argentine et au Brésil. Pour cela, on renverra surtout aux discussions critiques, à la présence de Barthes dans la fiction et aux thèses d’étudiants d’Amérique Latine dirigées par Barthes – sans oublier sa présence dans le marché éditorial (traductions). Ce panorama nous permettra de montrer son rôle dans la légitimation de quelques paradigmes critiques ou, tout au contraire, son rôle dans la mise en question des idées dominantes dans la région. 


Barthes et l’Argentine

par Ester Pino Estivill

Cette communication se donne pour objectif étudier l’irruption de Barthes dans la critique argentine au milieu des années soixante. Pour ce faire, l’analyse veut mettre la lumière sur plusieurs scènes. Premièrement, la réception et les traductions de l’œuvre de Barthes en espagnol. Deuxièmement, l’usage proliférant de concepts-clés de Barthes (« écriture », « écrivain-écrivant », « mythologie », « jouissance ») dans la critique littéraire et culturelle argentine, à l’origine d’une critique créative et autonome — tel est le cas des premiers lecteurs argentins de Barthes, comme Nicolás Rosa ou Oscar Masotta, ou ceux qui se sont réunis plus tard autour des revues Los libros, Literal ou Punto de Vista.


Leyla Perrone-Moisés et la France : un regard barthésien

par Marcio Barbosa

Auteure d’une œuvre critique concentrée sur la littérature française, Leyla Perrone-Moisés est l’une des principales responsables de la diffusion des auteurs français dans l’univers culturel brésilien. Un auteur pourtant se lève au-dessus des autres dans cette œuvre, non seulement pour les traductions et analyses qu’elle a publiées de et sur lui en portugais, mais surtout pour le dialogue qu’elle établit avec Roland Barthes, même dans les livres où il n’est pas cité. Cette intervention portera donc sur les regards croisés des deux auteurs sur la France et le Brésil. 


Sarlo et Barthes : un instant dans la ville

par Laura Brandini

Comme nous le savons bien, les écrits de Roland Barthes ont joué un rôle fondamental dans la réflexion de tant d’intellectuels et d’écrivains dans le monde. En Amérique Latine, cela n’a pas été différent. En Argentine, l’une de ses premières lectrices est l’écrivaine et critique Beatriz Sarlo, qui depuis les années 1960 écrit sur Barthes et « avec » Barthes, c’est-à-dire qu’elle développe sa réflexion sur la littérature et la culture argentines tout en ayant Barthes à l’horizon. Dans ce sens, La ciudad vista : mercancías y cultura urbana (2009), de Sarlo, se présente comme un vagabondage de l’écrivaine par Buenos Aires où l’incident s’impose sans dire son nom et rend possible la co-présence d’une « ville vue » avec une « ville écrite ». Sarlo et Barthes se conjuguent dans l’instant de l’écriture et promeuvent non seulement la circulation des textes, mais leur imbrication quelque part entre la France et l’Amérique Latine.


Barthes et al. l’antépénultième lecture (incidents au fil des Andes)

par Marcelo Villena

Le 16 février 1980, à la pénultième séance du cours La préparation du roman, Roland Barthes témoigne d’un certain « archaïsme » de la littérature (de sa marginalité, de sa désuétude) et à la fois d’un « désir fort de cette même littérature » : « j’aime la littérature d’une sorte d’amour pénétrant et bouleversant même, comme on aime et comme on entoure de ses bras quelque chose qui va mourir ». Ce témoignage pointe de diverses manières dans la trame de l’écriture barthesienne. Or il parvient à toucher aussi, entre autres, « un peu comme les cendres que l’on jette au vent après la mort » (les biographèmes), l’œuvre de deux écrivains boliviens plus ou moins reconnus dans l’espace littéraire sud-américain : Blanca Wiethüchter (1947-2004) et Juan Cristóbal Mac Clean (1958). Cette intervention tentera de détacher quelques incidents de lecture qui relèvent d’une telle connivence : façon de célébrer les avatars d’un « désir fort de littérature » aux antipodes du Collège de France, bien entendu, mais aussi d’apprécier les enjeux que comporte à l’heure actuelle, ici et là-bas, son inactualité.


L’Héritage (français ou américain ?) de Claude Lévi-Strauss

par Corinne Blanchaud

Cette communication entend présenter certains aspects de l’œuvre de Claude Lévi-Strauss, qui s’est peu à peu construite au contact des Amériques et de la France, comme un héritage vivant susceptible d’alimenter la réflexion sur le monde contemporain. En effet, le regard porté par Claude Lévi-Strauss sur la façon d’appréhender la multiplicité et la diversité culturelles, le sacré et l’interdit, ne peut-il être aujourd’hui considéré comme le révélateur de certains effacements propres à une époque, la nôtre, confondue toujours davantage dans l’uniformisation culturelle ? 


Usages et disséminations de la déconstruction au Brésil

par Max Hidalgo

La déconstruction a eu un avenir fécond et pluriel au Brésil. Cette communication veut montrer comment se sont disséminées quelques idées-forces de la pensée derridienne au Brésil et comment la pensée de la différence a permis de penser la spécificité brésilienne. Les notions d’ « entre-lieu » (Silviando Santiago), « transcréation » (Haroldo de Campos), « diferonça » (Viveiros de Castro) ou « littérature pensante » et « pensée végétale » (Evando Nascimento) sont autant d’interventions qui mobilisent l’héritage de la déconstruction en faisant un usage créatif et non révérenciel. 


La francofilia sin Francia

par Magdalena Campora

Este trabajo busca problematizar la noción de francofilia, naturalizada en el uso y en la teoría sobre procesos de transferencia cultural entre la Argentina y Francia. Nuestra propuesta es que no se trata tanto de un conjunto de opiniones y afectos respecto de un eventual modelo francés, como de un concepto relacional, atravesado por tensiones y conflictos locales, políticos y sociales. Para explorar esa idea contrastaremos, entre fines del siglo XIX y mediados del siglo XX, una francofilia que se piensa modernizadora y cosmopolita con un ámbito específico donde el discurso francófilo responde a nuevas condiciones de enunciación: las ediciones populares de literatura francesa en la Argentina.

 « La francophilie sans la France »

La notion de francophilie, que nous voudrions ici problématiser, semble naturalisée dans l’usage et dans la réflexion sur les transferts culturels entre l’Argentine et la France. Notre idée est qu’il s’agit moins d’un ensemble d’opinions et d’affects à l’égard d’un éventuel modèle français, que d’un concept relationnel, traversé par des tensions et des conflits locaux, politiques et sociaux. Pour explorer cette idée on s’intéressera, entre la fin de siècle et les années 1950, aux contrastes entre les discours d’une francophilie qui se veut cosmopolite et les formes particulières de francophilie qui se présentent dans les éditions populaires de littérature française en Argentine. 


Bourdieu, Foucault y America Latina

par Mabel Morana

Analizaré en esta presentacion los aportes y recepción de estos pensadores en el espacio interdisciplinario de las Humanidades y los desencuentros entre los cuerpos de ideas de estos autores y aspectos específicos del desarrollo regional en America Latina desde el punto de vista cultural e ideológico. 

Hare referencia a aspectos concretos de la obra de estos pensadores sobre todo en relacion con tetmas clave de la historia latinoamericana, como las de colonialidad, raza y particularidades vinculadas a la clase social. Aludire tambien a formas diferenciadas de recepcion de estos filosofos y sus proyecciones en los distintos campos de la cultura.


El estructuralismo francés en la tierra de la filología. Poética, lenguaje y signo en México.

par Ignacio Sanchez Prado

Esta ponencia discute el impacto que el estructuralismo francés tuvo en la crítica literaria, con particular énfasis en los años setenta a ochenta. La polémica tiene dos partes. Primero, se discute la forma en que e estructuralismo francés, parte de una constelación que incluyó también escuelas lingüísticas y semióticas de la Europa del Este, impulsó un giro lingüísitico en los estudios literarios mexicanos que simultáneamente complementó y desafió las tradiciones filológicas que primaban en la época. La ponencia discute legados de esta escuela discutiendo revistas como y Morphé y el trabajo de algunos de los críticos que llevaron la batuta de la semiótica en México. La segunda parte pone énfasis en la obra de Octavio Paz, el rol renuente que jugó en la difusión del estructuralismo francés en México y la forma en que su poesía responde al reto de la arbitrariedad del signo.


Concerts baroques

par Chantal Lapeyre

Sur les scènes contemporaines, dans les arts, en littérature paraissent aujourd’hui des œuvres pour qui le mot de « baroque » fait signe et sens. Pour approcher la nature et les enjeux de ce mot et des réalisations qui s’en réclament, il est bien sûr toujours nécessaire de revenir à une période historique donnée (bien que ses contours soient flous), à ses œuvres, mais aussi aux documents, archives, traités, images en tous genres, qui ont été transmis à travers le temps. Mais – et ce sera l’hypothèse défendue ici – il importe également de prendre en compte les représentations plus ou moins récentes du baroque, à saisir comme autant de relais de ce monde au fil du temps – parce qu’elles informent sans doute les créations mais aussi la réception qui en est faite aujourd’hui. Concert baroque, d’Alejo Carpentier, est une pièce maîtresse pour cette archéologie du regard baroque qui se cherche et s’interroge ici en filigrane. Ce roman, publié en 1974, et traduit en français en 1976, a fait date, à n’en pas douter, pour les créateurs comme pour le public – qu’ils en aient ou non une connaissance directe.


Regards des écrivains martiniquais Aimé Césaire et Édouard Glissant sur l’art cubain

par Renée-Clémentine Lucien

Deux poètes et penseurs des Antilles françaises, Aimé Césaire (1913-2008) et Édouard Glissant (1928-2011), ont noué et entretenu avec des artistes cubains des relations intellectuelles et complices fondées sur une sensibilité et une histoire communes. Ces deux poètes ont trouvé dans l’oeuvre du peintre Wifredo Lam (1902-1982) une énergie et un vocabulaire en totale adéquation avec les vibrations d’un monde caribéen ontologiquement hybride et métamorphique. Un dialogue avec le peintre a nourri respectivement l’oeuvre poétique et d’essayiste de ces écrivains. Glissant a, par ailleurs, perçu dans la sculpture d’Agustín Cárdenas (1927-2001) un travail de la matière dont il a su mettre en lumière à la fois l’enracinement dans un espace et l’ouverture propre à une poétique du divers.


« Histoire sans importance » ou, Roberte Horth (Cayenne, 1905 – Paris, 1932), première écrivaine et ethnographe francophone guyanaise ?

par Andy Stafford

Dans son essai extraordinaire, Le patois guyanais, essai de systématisation, publié à Cayenne en 1949, Auguste Horth dédicace le volume à sa fille Roberte Agnès, décédée plus de quinze ans avant, à l’âge tendre de 26 ans. La coïncidence de la méthode dans Le patois guyanais avec celle de Jean Paulhan dans sa thèse abandonnée Sémantique du proverbe est flagrante. Horth attribue à sa fille, en majeure partie, le projet sur les dolos, les proverbes en créole guyanais que Roberte avait récoltés pendant sa vie courte. La seule trace de son écriture à elle est la nouvelle intrigante, « Histoire sans importance », publiée à Paris dans La Revue du monde noir en 1932. Quel lien peut-on établir entre, d’un côté, un récit bref sur le sang-mêlé d’une Martiniquaise à Paris et, de l’autre, une vaste étude sur la culture orale faite d’un « cœur brûlant d’une profonde piété » pour son pays natal ?


« La mort absurde des Aztèques. I. Le Banquet de Mouloud Mammeri » : approche littéraire et anthropologique

par Khadidja Khelladi

L’ouvrage de l’écrivain algérien Mouloud Mammeri dont il sera question dans cette communication comporte un drame en trois actes intitulé Le Banquet et un essai sur La mort absurde des Aztèques. La disparition des Aztèques y est présentée comme une catastrophe culturelle. Franchissant les siècles, l’auteur établit aisément un parallèle avec la société contemporaine qui, techniciste, pourrait provoquer elle-même la disparition de l’homme. Il en appelle à la raison et au respect des différences pour sauver tous les « ethnocidés » possibles de la planète. La mise en scène tragique du Banquet explique comment l’hybris des vainqueurs et l’aveuglement des vaincus n’ont pas permis d’échapper à un conflit destructeur alors que comme le préconisait Montaigne « (Notre) monde vient d’en rencontrer un autre. » Anthropologue, M. Mammeri, insiste sur ces rencontres enrichissantes avec les autres pour peu qu’on s’abstienne « de les civiliser et de définir pour eux le bonheur. » 


L’enclavement du temps dans « Cent ans de solitude » de G- G. Marquez et « La vie et demie » de Sony Labou Tansi : approche comparative

par Boussad Saim

À partir d’une approche comparative, cette communication se propose de montrer comment le texte de Sony Labou Tansi, La vie et demie entre en dialogue avec celui de G.-G. Marquez, Cent ans de solitude. Dans les deux romans les personnages sont confrontés aux mêmes vicissitudes de l’existence et semblent enfermés dans la fatalité d’un temps bloqué, condamnés à vivre les mêmes déboires. Cependant, si les similitudes entre les deux textes sont évidentes, Sony- Labou-Tansi sait garder la liberté nécessaire pour laisser jouer son imagination à son gré et avec sa touche stylistique ; c’est là que réside l’intérêt essentiel de son roman.


Le Fonds Sud Cinéma et le cinéma latino-américain : bilan et conclusions

par Julie Amiot-Guillouet

Le Fonds Sud Cinéma est un fonds de soutien français qui a, entre 1984 et 2011, aidé à la production et à la finition de plus de 500 longs métrages de pays du « Sud ». Nombre de films produits dans ce cadre ont ensuite eu une fortune critique et festivalière appréciable, gage d’une « qualité » artistique en adéquation avec les objectifs de ce fonds de soutien sélectif. Toutefois, le mode d’évaluation des projets, fondé sur l’examen des scénarios, fait apparaître le poids des qualités rédactionnelles des candidat.es dans le processus de sélection. Une étude de cas montrera la valorisation des qualités « littéraires » du scénario davantage mises en avant que son potentiel de mise en scène audio-visuelle.


La croisée des chemins

par Gérard Macé

N.C


Non

Do Amaral Tarsila (1886-1973), Carnaval em Madureira, Fondation Nemirovsky (Pinacoteca de São Paulo, Brésil)

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